Ma rubrique radio #3
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Nouvelle petite visite a la radio locale 4EB ce samedi.
Possibilite de re-ecouter en podcast: http://www.4eb.org.au/ondemand : Choisir French puis select - attendre 6 minutes 30 (en ligne jusqu'au 31 aout)
Un petit goût d’enfance
Avec une amie nous comparions récemment des recettes de ce petit biscuit doré, moelleux, fondant et qui se reconnait grâce à sa bosse si caracteristique. Vous avez trouvé de quoi je vais vous parler aujourd’hui?
Effectivement, aujourd’hui, je vais vous causer de la madeleine! Alors si vous fermez les yeux et que je vous redis: petit biscuit au beurre, savoureux, tendre, un peu citronné et qui fond en bouche. Je suis sure que vous avez presque le goût sur le bout de la langue, non?
Mais la madeleine, qu’a-t-elle de si special pour que l’on puisse en faire tout un plat?
Plusieures légendes expliquent l’origine de ce petit gâteau de renom.
La 1ère légende indique que la madeleine remonterait à l'origine du pèlerinage de Saint-Jacques-de-Compostelle, où une jeune fille, nommée “Madelaine”, aurait offert aux pèlerins un gâteau aux œufs, moulé dans une coquille Saint-Jacques, coquille qui est l'emblème du pèlerinage – et dont on retrouve les raynures sur le biscuit.
Lorsque l’on dit madeleine, on pense aussi à Commercy, berceau de la seconde légende. A la fin du XVIIIs Commercy était la résidence du roi Stanislas, alors roi de Pologne déchu mais duc de Lorraine et de Bar. La légende raconte qu'un soir de 1755, l'intendant et le pâtissier du château de Commercy se fâchent. Le pâtissier rend alors son tablier et quitte le château, apparement son dessert sous le bras (j’espere qu’il n’était pas plein de Chantilly!). Comme le roi était gourmand et que tout repas doit se finir avec un dessert, pour sauver le dîner, Madeleine, une femme de chambre du chateau, improvise des gâteaux à partir d'une recette de sa grand-mère. Tout le monde se délecte de ce nouveau dessert et Stanislas baptise ce gâteau du nom de sa créatrice, la madeleine.
La notoriété de ce petit gâteau se forge réellement à partir de juillet 1852 lorsque l’empereur Louis Napoléon inaugure la ligne de chemin de fer Paris-Strasbourg. Grâce à un arrêt préfectoral, la vente de madeleines sur le quai de la gare de Commercy est alors autorisée et conduit à la multiplication du nombre de producteurs de madeleines et mais aussi du nombre de vendeuses sur les quais de la gare. Ces vendeuses, portant de grands paniers d'osier aux marques bien apparentes, circulaient alors au milieu de la foule en gare de Commercy, en criant aussi fort qu'elles le pouvaient le nom de la fabrique qu'elles représentaient. Les madeleines étaient vendues par douzaine dans des boîtes en sapin des Vosges (remplacees aujourd’hui par des boites en hetre). La vente de la madeleine à la criée et aux fenêtres des trains s’est poursuivie jusqu’à la moitié du XXs, gonflant ainsi la popularité de ce biscuit.
Voila pour les petites histoires. Mais, aujourd’hui, qui dit madeleine dit aussi Proust. Dans son roman Du cote de chez Swan (paru en 1913 - 1er volume de la série “A la recherche du temps perdu”), l’auteur évoque ses souvenirs d’enfance jaillis de sa mémoire grâce à une simple bouchée de madeleine. Il écrit ainsi:
“Et bientôt, machinalement, accablé par la morne journée et la perspective d'un triste lendemain, je portai à mes lèvres une cuillerée du thé où j'avais laissé s'amollir un morceau de madeleine. Mais à l'instant même où la gorgée mêlée des miettes du gâteau toucha mon palais, je tressaillis, attentif à ce qui se passait d'extraordinaire en moi. Un plaisir délicieux m'avait envahi, isolé, sans la notion de sa cause.”
Depuis notre petite madeleine de Proust est devenue une véritable métaphore lorsqu’un petit évènement fait resurgir des souvenirs de jeunesse ou simplement des souvenirs très riches en émotions.
Chacun a “sa” madeleine. Je dirai que la mienne serait les îles flottantes de ma grand’mère ou même une madeleine olfactive qui aurait l’odeur de la maison où j’ai passé bon nombre de mes grandes vacances.
Avec de telles légendes et succès, on pourrait penser que la préparation de ce petit gâteau est un jeu d’enfant. J’ai été bien étonnée d’avoir à ré-essayer plusieurs fois pour avoir simultanément le goût de mon enfance et la belle bosse. Je n’ai pas essayé avec des coquilles St Jacques, mais il est essentiel d’avoir les bons moules, qu’ils soient métaliques ou en silicones, et de bien les beurrer pour pouvoir démouler facilement nos gouteuses madeleines. Les ingrédients sont classiques (farine, sucre, oeufs, beurre) mais le petit zest d’un citron ou quelques goutes de fleurs d’orangers feront toute la différence.
Il semblerait que le secret de la bosse réside dans le choc thermique. Une fois les ingrédients mélangés, il faut effectivement mettre sa pâte à reposer au frigo pendant au moins 2h (ou mieux toute une nuit). Puis, il ne faut pas trop remplir les moules. Il faut faire cuire les madeleines d’abord à four bien chaud (220-230°) jusqu’à ce que la bosse soit formée puis baisser la température du four à 180° pour qu’elles finissent leur cuisson.
De part son goût, sa forme et les souvenirs qu’elle nous évoquent la madeleine dorée, légère et moelleuse ne peut pas nous laisser indifférent et se valait bien d’etre le sujet d’une de mes petites rubriques.
Alors a vos tabliers et bonne dégustation. Emotions guaranties!